Yann Orpheus Blog

— On a fêté la fin du ramadan. Vous aimez ? Servez-vous ! Vous pouvez en prendre autant que vous voulez. J’en ai de trop.
— Mmm, je salive rien qu’à les voir. Alors je vais me laisser tenter par un de chaque. Merci beaucoup, c’est très gentil.
— C’est nous qui vous remercions. On ne doit pas être facile tout le temps.
Je sais à quoi elle fait allusion. Son fils ainé est autiste et il lui arrive exceptionnellement d’avoir des épisodes très sonores. Je me rappelle, quand ils ont emménagé l’année dernière, j’entendais le gamin hurler tous les soirs jusqu’à plus d’heures et le père, à bout de nerfs, prendre le relais, à son tour aussitôt remis à sa place par son épouse. Ne sachant pas, je me demandais si je devais intervenir et appeler les services sociaux pour maltraitance. Et puis, informé par la gardienne, j’ai compris le pourquoi du comment. Heureusement, le gosse a rapidement pris ses repères et les cris permanents ont cessé. Depuis, culpabilisant un peu d’avoir pensé au pire, je m’arrange pour avoir toujours un mot aimable à chaque fois que je croise cette famille.
— Vous n’en voulez pas plus ? Vous êtes certain ?
— Ne me tentez pas, je n’ai aucune discipline avec les sucreries. Et puis, je ne veux pas priver vos enfants. J’ai pas envie que M_ pense que je lui vole tout son quatre-heures !, dis-je en faisant un clin d’œil au gosse.
— L’idée vient de lui ! Quand il a vu tous les restes hier, il a répondu « faut en donner à Yann ».
— Awww ! 🥰 
Je descends au niveau du gamin.
— Merci, Monsieur M_, ça me fait bien plaisir.
Il me fait un sourire des plus adorables, les yeux plissés. Je vois tout de suite que c’est un jour où il ne se sent pas de me parler. Parfois j’ai le droit à quelques mots. Là, ce sera juste un sourire. Je prends aussi. Je sens un peu ma gorge se nouer…
On poursuit un peu notre discussion. Je découvre qu’en 7 ans, ils ont été contraints de déménager trois fois. Problème de voisinage, etc, etc… Je comprends mieux pourquoi j’avais vu son mari poser de grandes plaques d’isolant sur leur mur du couloir d’entrée (mitoyen avec ma chambre de l’autre côté), quelque temps après leur arrivée (sans que je fasse la moindre réflexion).
— On est bien ici. J’espère qu’on va rester.
— Ah ben moi, aussi ! Surtout si vous me donnez des choses délicieuses comme ça après tous les ramadans. 😉
On a ri. 😂

Vive le vivre-ensemble ! 🤝🕊️
Les plus autistes ne sont pas toujours ceux que l’on croit.