Le prisme israĂ©lien đŸ‡źđŸ‡±

J’écris rarement avec des pincettes. Et pourtant, lĂ , je sens que je vais devoir fournir un effort. J’ai abandonnĂ© et recommencĂ© ce papier trois fois. Et en Ă©crivant ces lignes, je me demande toujours si je vais le publier. C’est dire si le sujet est sensible et cristallise haines et colĂšres. Ce n’est pas comme si j’allais changer quoi que ce soit, alors Ă  quoi bon risquer de m’attirer des foudres partisanes ? Je crois que je suis tellement gavĂ© que j’ai besoin de vider ce sac.

Dessin d'un prisme posé sur une surface. Le rayon qui le traverse est décomposé au couleur du drapeau de l'Etat d'Israël.

Depuis quelque temps, tous les Ă©vĂ©nements de l’actualitĂ© et toutes les personnes qui la font sont examinĂ©s et jugĂ©s Ă  travers la loupe du conflit israĂ©lo-palestinien. Impression que toute information doit ĂȘtre passĂ©e Ă  travers un prisme mĂ©diatique qui donne un Ă©clairage et une interprĂ©tation selon son positionnement par rapport Ă  la politique de l’État d’IsraĂ«l. Et plus ça va, plus je cocotte-minute... đŸ˜€

Bien Ă©videmment cela touche les dirigeants politiques et leur campagne. Un des principaux sujets montĂ©s en Ă©pingle lors des derniĂšres lĂ©gislatives françaises Ă©tait de savoir s’il Ă©tait envisageable de confier le pouvoir Ă  une coalition de gauche dont un des partis Ă©tait taxĂ© d’antisĂ©mitisme. Et pendant ce temps, l’extrĂȘme droite s’offrait une virginitĂ© sur la question...
Aux États-Unis, Kamala Harris a souffert de la proximitĂ© de l’administration Biden avec IsraĂ«l, et Trump a bĂ©nĂ©ficiĂ© dans des swings states comme le Michigan et le Wisconsin du vote massif de la communautĂ© musulmane (avant de mieux leur mettre Ă  l’envers en nommant des conseillers pro-IsraĂ«l Ă  peine Ă©lu. Cheh !)
Le conflit finit par s’inviter rĂ©guliĂšrement dans notre quotidien, comme dans les tribunes des matchs de foot causant polĂ©miques et violences, ou encore Ă  l’Eurovision. On peut aussi mentionner le licenciement d’humoristes chroniqueurs de radio
 Et comme si ce bordel ne suffisait pas, un Ă©lu trouve judicieux de jeter de l’huile sur le feu en se livrant Ă  des simulacres d’agressions.  
LĂ -dessus, le CRIF commande un sondage sur l’antisĂ©mitisme dont la formulation de certaines questions et les interprĂ©tations me semble assez discutables. Je ne nie pas l'existence de l'antisĂ©mitisme, mais je m'Ă©nerve de son instrumentalisation systĂ©matique afin de justifier tout et n'importe quoi. LĂ  encore, le fameux prisme en action


De son cĂŽtĂ©, Macron marche sur des Ɠufs depuis sa petite formule du « soutien inconditionnel Â» Ă  IsraĂ«l de 2017, renouvelĂ©e en 2023. Il finit quand mĂȘme par se mettre le CRIF Ă  dos quand les limites des bornes sont indiscutablement dĂ©passĂ©es. Visiblement l’inconditionnel est soumis Ă  conditions, mais ce ne sera pas la premiĂšre fois qu’il dit une chose et son contraire.
Et maintenant que la Cour PĂ©nale Internationale vient de dĂ©poser un mandat d’arrĂȘt contre le Premier ministre israĂ©lien pour crime de guerre et crime contre l’humanitĂ©, il va ĂȘtre un peu plus rock n’roll pour la prĂ©sidence comme pour la classe politique de le soutenir aveuglĂ©ment.

Il y a un ou deux ans de cela, j’avais rĂ©pondu « IsraĂ«l voudrait encourager l’antisĂ©mitisme qu’il ne s’y prendrait pas autrement Â» Ă  une personne qui insistait pour me faire rĂ©agir Ă  je ne sais plus quelle polĂ©mique du jour. Il m’avait rĂ©pondu « Tu ne peux pas comprendre, t’es pas juif. Et attention, c’est un peu comme si tu disais que les homosexuels Ă©taient responsables de l’homophobie ! Â». Alors un, si je ne peux pas comprendre, faut me laisser tranquille et ne pas me poser de questions đŸ€·â€â™‚ïž. Et deux, cette comparaison fallacieuse sera recevable le jour oĂč des homos iront trucider des gens en justifiant cet acte parce qu’ils ont trop longtemps Ă©tĂ© victimes de leur hĂ©tĂ©rosexualitĂ©. đŸ™„
Encore ce foutu prisme israĂ©lien qui dĂ©forme tout et veut mettre en comparaison des choses qui n’ont rien Ă  voir ensemble. Exprimer son opinion devient problĂ©matique dans la mesure oĂč on devient systĂ©matiquement accusĂ© d’antisĂ©mitisme et d’apologie de terrorisme dĂšs qu’on ne soutient pas la politique colonialiste de Netanyahou.
Je pense Ă  Le garçon qui criait au loup de la fable d’Ésope. En s’amusant et abusant de fausses alertes, il finit par ne plus ĂȘtre pris au sĂ©rieux quand le danger devient rĂ©el. À trop crier « Ă  l’AntisĂ©mitiiisme ! Â», tout finit par le devenir, et finalement plus rien ne l’est vraiment.
« Oui, mais il y a eu la Shoah
 Tu peux pas comprendre
 Â»
Certes, mais avoir subi un gĂ©nocide ne donne pas un totem d’immunitĂ© Ă  vie. Il s’agit aussi d’ĂȘtre Ă  la hauteur de son histoire. C’est aussi comme cela qu’on honore la mĂ©moire de ses ancĂȘtres.
« Oui, mais le 7 octobre
 Â»
Comme si le conflit avait commencĂ© ce jour-là
 Il ne faudrait pas occulter toutes les horreurs de part et d’autre qui ont prĂ©cĂ©dĂ© ce massacre. Escalade sans fin depuis des gĂ©nĂ©rations.

Que les choses soient claires, je ne suis pas en admiration devant le Hamas, et ni je dĂ©douane, ni ne justifie ses actions terroristes. Loin de lĂ  ! J’applaudis tout autant le mandat d’arrĂȘt Ă©mis par la CPI contre Mohammed Deif, chef de la branche armĂ©e du Hamas.
Juste j’ai une tendance naturelle Ă  ĂȘtre du cĂŽtĂ© du citoyen qui est peinard chez lui et que l’on cherche Ă  affamer, expulser et exterminer. Par ailleurs, quand on en est Ă  ergoter pour savoir s’il y a un gĂ©nocide ou « seulement un risque gĂ©nocidaire », c’est qu’il y a tout de mĂȘme quelque chose de pas trĂšs joli et de bien puant en train de se passer. Mon soutien au peuple palestinien qui en fait les frais est Ă©vident.
Alors, ce prisme mĂ©diatique qui tente d’altĂ©rer la perception de l’opinion, qui a des consĂ©quences directes sur les politiques mondiales, notre quotidien et qui a potentiellement la capacitĂ© de dĂ©clencher une guerre mondiale a en effet tendance Ă  me dĂ©gonder les nerfs


Taxez-moi d’antisĂ©mitisme si ça vous chante. J’ai connu pires insultes, croyez-moi.
Le dictionnaire dĂ©finit l’antisĂ©mitisme comme « une certaine perception des Juifs qui peut se manifester par une haine Ă  leur Ă©gard Â». Je ne parle pas ici de judĂ©itĂ©, mais de la politique menĂ©e par l’État d’IsraĂ«l. Je n’ai aucune haine vis-Ă -vis d’aucune nationalitĂ© ou religion d’ailleurs. Je considĂšre l’antisĂ©mitisme comme Ă©tant tout aussi condamnable que l’islamophobie ou n’importe quelle autre discrimination. Finalement, ce serait tout aussi stupide de dire que je suis anti-français ou anticatholique parce que je hais Macron et condamne sa politique.

J’admire vraiment le courage de personnes juives qui prennent la parole contre la politique colonialiste menĂ©e par Netanyahou. Personnellement, je suis plus rĂ©ceptif Ă  cette musique-lĂ , qui hĂ©las n’obtient pas Ă©normĂ©ment d’échos dans les mĂ©dias français mainstream. Je pense ici entre autres Ă  MichĂšle Siboni, porte-parole de l’Union Juive Française pour la Paix, Schlomo Sand , Michel Warschawski, Rauni Brauman, ancien dirigeant de MĂ©decins Sans FrontiĂšres ou encore Daniel Schneidermann qui dĂ©nonce le traitement pro-israĂ©lien des mĂ©dias français, ce que j'appelle ici le Prisme IsraĂ©lien.
Total respect ! đŸ«Ą

J’aimerais ĂȘtre plus optimiste.
Je crains hélas que tout cela dégénÚre de mal en pis.
Aussi bien là-bas, qu’ici
 😔

 

N.B. : Vu le contenu de ce papier, je vous invite Ă  privilĂ©gier ici vos remarques/commentaires plutĂŽt que sur les rĂ©seaux sociaux, oĂč je n’y rĂ©pondrai pas. Merci.

Eurythmics - Peace is just a word (peacetour live 1999)

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